La voie Lakota des cinq leçons de sagesse sioux
L’écrivain et historien Lakota Joseph Marshall III dans son livre La Voie Lakota de la force et du courage nous parle des qualités fondamentales d’une vie pleine et digne imagée avec la flexibilité de l’arc, la délicatesse de la flèche, la persévérance de l’archer. Il a aussi publié de nombreux autres livres non romanesques basés sur l’histoire et la culture orales des Lakota. Il est né et a grandi dans la réserve indienne de Rosebud, dans le Dakota du Sud, et est un membre inscrit de la tribu amérindienne Sicangu Oyate (Rosebud Sioux, Lakota) reconnue par le gouvernement.
Pour commencer voici les quatre grandes valeurs Lakota
1 / Wacintaka , est le mot Lakota pour courage
Qui signifie affronter le danger ou les défis avec courage, force et confiance. Croire en soi permet à une personne de relever des défis. Le courage comprend la capacité de composer avec les problèmes, de les accepter et de trouver une solution qui soit bonne pour tout le monde.
L’une des premières leçons qu’un enfant Lakota a apprises autrefois était la maîtrise de soi et la retenue en présence de parents ou d’adultes. Quelqu’un de plus qualifié que soi était considéré comme un modèle, pas comme un concurrent.
Le courage peut exiger de la patience, de la persévérance et de la force d’esprit face aux défis. Cela implique d’avoir confiance en soi et le courage de continuer même lorsque toutes les chances sont contre vous. La peur existe toujours, mais vous continuez malgré la peur.
Woksape – qui est le mot Lakota pour Sagesse :
La connaissance et la sagesse des personnes âgées sont très importantes pour le bien-être du peuple Lakota. C’est quelque chose qui est recherché et gagné tout au long de sa vie, mais pas seulement en ajoutant des années à sa vie.
La sagesse a à voir avec la compréhension de la signification dans les processus et schémas naturels. Cela signifie connaître la conception et le but de la vie.
Il s’agit également de comprendre et de vivre les valeurs et les croyances spirituelles sur lesquelles se fonde sa culture et de pouvoir les partager avec les autres. La sagesse signifie pouvoir incorporer le mode de vie sacré dans sa propre vie et les respecter et les honorer toute la vie.
Wacantognaka , le mot Lakota pour générosité :
Qui signifie contribuer au bien-être de son peuple et de toute vie en partageant et en donnant librement. Ce partage n’est pas seulement des objets et des biens, mais des émotions comme la sympathie, la compassion, la gentillesse.
Cela signifie également être généreux avec son temps personnel. Le fait de donner et de ne rien chercher en retour peut faire de vous une meilleure personne et vous rendre plus heureux.
4 / Wotitakuye , ou parenté , est l’une des valeurs importantes provenant de la tiyospaye , la famille élargie .
Elle comprend les idées de vivre en harmonie, l’appartenance, les relations comme la vraie richesse et l’importance de faire confiance aux autres. C’est l’une des valeurs qui fait fonctionner la tiyospaye .
La famille est la mesure de votre richesse. Elle doit vous soutenir dans les bons et les mauvais moments. Pour un Lakota, vous appartenez à une tiyospaye par naissance, mariage ou adoption. Votre famille s’étend même à votre groupe et à toute la nation Lakota. Chaque fois que vous voyagez quelque part, vous pouvez vous attendre à être accueilli et soutenu comme si vous étiez dans votre propre famille immédiate.
Pour revenir à Joseph Marshall III, les histoires et légendes racontées par ses grands-parents Lakotas ont bercé son enfance. Il a écrit dans Le Cercle de la vie :
« Elles sont notre don au monde. Ce ne sont pas des secrets, mais des repères sur le chemin de la vie – les réponses qui s’élèvent au-dessus des grandes plaines de nos vies portées par le vent de la sagesse pour nous aider »
Son dernier livre, La Voie lakota de la force et du courage, continue son oeuvre sur l’initiation aux traditions amérindiennes au travers d’histoires et d’expériences personnelles. Joseph Marshall III, qui est aussi fabricant d’arcs et archer, a sélectionné 5 enseignements : les plus importants, selon lui, parmi tous ceux qu’il a reçus.
Voici donc la Voie Lakota, les 5 leçons de sagesse sioux
La transformation
La leçon.
Pour les Lakotas, la vie est avant tout une succession de transformations.
« Certaines sont lentes, comme ce que subit la tige pour devenir un arc. D’autres sont rapides, comme la tige verte que mon grand-père a taillée, assainie et fait durcir au-dessus du feu. »
L’important, nous dit Joseph Marshall III, est d’en être conscient afin de ne pas les subir.
« Comme les facteurs d’arcs, qui abordent leur tâche avec respect, douceur, attention, de façon à fabriquer le meilleur arc possible. »
La pratique.
Il s’agit de renforcer et favoriser les transformations positives. Une fois par semaine, prenez le temps de vous repasser le film des derniers jours en les revivant : visualisez les moments, ressentez les émotions qui leur sont associées.
Puis essayez de repérer d’une part ce qui, dans vos relations, vos tâches, votre organisation, vous procure du plaisir et un sentiment d’équilibre et, d’autre part, ce qui vous agace, vous inquiète, vous agresse ou vous épuise. Une fois ces deux pôles identifiés, réfléchissez à ce qui pourrait menacer votre pôle positif et à la façon dont vous pourriez trouver un nouvel équilibre satisfaisant ; puis à ce qui pourrait améliorer votre pôle négatif. Planifiez une série d’actions concrètes à réaliser au jour le jour, avec patience et ténacité.
La simplicité
La leçon.
« Chaque aspect de la construction d’un arc et d’une flèche était réduit à sa forme la plus simple possible. Cette conception rendait la construction facile. Préserver les choses simples était bien plus qu’une philosophie. Cela avait une application pratique au jour le jour. Mes grands-parents avaient choisi un style de vie simple afin de pouvoir exploiter au mieux les ressources disponibles », écrit Joseph Marshall III.
En précisant que leur vie ne l’était pas toujours, tant s’en faut, mais que la solution qu’ils choisissaient pour atteindre un objectif était celle qui était la plus aisée, la moins dispendieuse, celle qui respectait une forme d’équilibre et d’harmonie naturels. Pour l’auteur, ralentir, trouver des endroits calmes, en soi et à l’extérieur, faire la différence entre le suffisant et le trop sont les seuls moyens de nous faire apprécier la saveur de la vie et de ne pas dilapider l’énergie, la nôtre et celle de notre environnement.
La pratique.
Prendre conscience que tout est énergie (les pensées, les mots, l’argent, la matière…) et que, en tant qu’êtres vivants dans un monde fini, nous ne disposons pas d’un capital énergétique illimité. Tout ce que nous produisons et consommons à un coût. Mieux nous gérons notre énergie – physique, psychique et spirituelle – mieux nous vivons. Dans cette perspective, la simplicité devrait être notre boussole, celle qui guide notre façon de communiquer (authenticité, discrétion) ou de consommer (responsabilité, sobriété).
Entraînez-vous chaque jour à qualifier vos actes (propos, achats, décisions…) de « justes » ou de « trop ». Trop compliqué ou excessif. Faites confiance à votre petite voix intérieure, qui sait mieux que votre mental ce qui nourrit la simplicité ou l’excès. Identifiez ceux qui, dans les « trop », vous ont procuré du plaisir ou du bien-être, puis réfléchissez à la façon dont vous pourriez obtenir ces mêmes bénéfices sans en passer par l’excès.
L’objectif
La leçon.
« Peu d’objets tels que l’arc et la flèche symbolisent à la fois le but et la fonction. Combinés, ils trouvent leur fonction mutuelle : atteindre un but », affirme l’auteur.
Il précise que, même si nous avons le sentiment de ne pas avoir de buts particuliers, nous pouvons, si nous le décidons, les trouver, ou leur permettre de nous trouver en les laissant jaillir de nous. L’objectif de Joseph Marshall III était de continuer la transmission des récits de ses ancêtres. Dans la sagesse lakota, celui que tous devraient tenter d’atteindre est d’aider les autres avant de penser à soi.
« Crazy Horse1 nous a appris que s’occuper des autres et être dans le don était la chose la plus juste à faire. » Chacun à sa manière, avec ses moyens.
« L’important est d’avoir le sentiment de prendre un engagement pour soi, et non de faire quelque chose par obligation ou par devoir. »
La pratique.
Apporter sa pierre, même minuscule, au mieux-être du monde ne peut se faire si l’on ignore laquelle nous convient à manier et à transporter. De même que l’archer, l’arc et la flèche ne font qu’un, il faut savoir choisir la forme de don qui nous ressemble le plus, celle qui émane de notre être profond. Certains sont doués pour écouter, d’autres pour conseiller, d’autres encore pour apporter de la gaieté ou de la beauté, pour dénoncer ou pour construire.
Ce sont les autres, vos proches, qui connaissent souvent mieux que vous votre talent altruiste particulier. Ils l’expriment avec leur gratitude lorsqu’ils vous remercient parce que vous les faites rire, apaisez leurs inquiétudes, dénouez une situation compliquée ou que vous les écoutez avec bienveillance. C’est simplement cette qualité qui est à cultiver, à dispenser généreusement, chaque fois que vous le pouvez.
La force
La leçon.
« Soyons comme l’arc en bois vert que mon grand-père faisait sécher au-dessus du feu. La chaleur l’a rendu plus fort. Sans cela, la tige ne serait jamais devenue un arc. N’importe quel facteur d’arc sait que la chaleur est le meilleur catalyseur. »
L’expression « l’épreuve du feu » n’a jamais été aussi éloquente que sous la plume de Joseph Marshall III, qui nous rappelle que nous avons volontiers l’impression qu’il n’y a pas de solution à nos problèmes, « et souvent, nous oublions que ces situations sont des opportunités d’acquérir de la résistance émotionnelle et mentale ». Peu importe que nous parvenions ou pas à surmonter l’épreuve. La vraie force réside dans le fait d’affronter le problème, et de manifester résistance et combativité. Faire face à l’obstacle révèle des ressources que les « temps de paix » laissent en sommeil.
La pratique.
Laissez venir à votre mémoire les différentes épreuves que vous avez eues à affronter dans votre vie. Ne vous focalisez pas sur l’issue, heureuse ou malheureuse, mais portez votre attention sur les ressources que vous avez eues à déployer.
- Qu’avez-vous appris sur vous ?
- Vous êtes-vous déçu ou agréablement étonné ?
- Qu’avez-vous fait de ces expériences ?
- À la lumière de ce que vous avez appris de vous et de la vie, comment les affronteriez-vous aujourd’hui ?
Une fois ce travail accompli, prenez un moment pour honorer votre force intérieure. Félicitez-vous, allumez une bougie, faites-vous un cadeau… Gardez à l’esprit que la vraie force est d’essayer de faire au mieux de ce que l’on peut, sans se mentir.
La résilience
La leçon.
« Une caractéristique incroyable de l’arc primitif lakota est sa capacité de résilience. Il y a trois raisons à cela : le bois que le facteur a choisi, le design simple et efficace de l’arc, l’habileté de l’artisan. »
Le bois pour les qualités intrinsèques de l’être humain, le design pour l’orientation de ses actions et de ses choix, et l’habileté pour sa manière de les conduire. Pour continuer malgré l’épreuve :
Joseph Marshall III nous incite à nous reposer « sur les qualités et les aspects de notre tempérament, qui sont, par nature, aussi puissants que ce qui nous a mis face à cette difficulté ».
Et si nous ne pensons pas avoir les ressources requises pour surmonter l’obstacle, il nous invite, comme le veut la tradition lakota, à nous appuyer sur notre entourage, à nous inspirer de la manière dont d’autres, avant nous, ont pu se redresser et poursuivre leur chemin.
La pratique.
Notre monde moderne dispose heureusement de ressources comme la thérapie pour nous permettre de nous relever des épreuves, de panser et d’apaiser nos blessures. Mais si le choc n’est pas trop fort, si nous sentons que nous avons besoin d’un simple coup de main pour nous redresser, nous pouvons essayer d’être pour nous-mêmes cette main secourable.
Pourquoi ne pas tenter de vous prodiguer les soins et les conseils que vous fourniriez à un être qui vous est cher ? Et si vous ne parvenez pas à vous relever tout seul, pourquoi ne pas solliciter des proches, qui pourront se relayer et vous apporter de l’aide et du soutien afin de favoriser votre convalescence ?
La Voie lakota de la force et du courage de Joseph Marshall III. Fort de l’enseignement de son grand-père, l’auteur transmet les leçons de sagesse des Lakotas (Vega, 218 p., 18 €).
1. Crazy Horse, chef lakota sioux (1840-1877) qui a lutté, comme Sitting Bull, contre les colons militaires américains.