Jean-Charles Réno
Tout ce qui est beau ne peut être emprisonné, car emprisonner la beauté est une manière de désintégrer son essence.
Je suis content que le temps passe. Pouvez-vous imaginer le désespoir qui nous envahirait si nous devions endurer un lundi éternel ?
La beauté de chaque jour n’existe que parce que cela ne dure pas. Tout ce qui est beau ne peut être emprisonné, car emprisonner la beauté est une manière de désintégrer son essence.
On raconte qu’il y avait une jeune fille qui s’émerveillait chaque matin de la présence d’un oiseau enchanté. Il se posait sur sa fenêtre et lui chantait une chanson qui ne durait pas plus de cinq minutes.
La beauté du chant était si intense que la chanson était dans son esprit pour le reste de la journée.
Un jour, elle décida de tendre un piège à l’oiseau enchanté. Quand il se posa sur sa fenêtre, elle le captura et l’enferma dans une cage pour entendre son chant plus longtemps.
Mais à cause de la cage, l’oiseau fut stressé et triste, il arrêta de chanter. C’est alors que la jeune fille découvrit que l’oiseau ne chantait que parce qu’il était libre. Le charme était justement de ne pas l’avoir.
Libre, il réussit à procurer la dose de charme qui sera nécessaire à la jeune fille pour endurer la vie à la fenêtre de sa chambre.
Le charme soulage l’existence ! Lorsque celui-ci est emprisonné, elle le possède, mais ne reçoit pas de lui ce qu’elle considère comme sa plus grande richesse : le chant !
Je n’arrête pas de penser qu’on ne parvient pas toujours à comprendre le charme. Parfois, nous insistons pour capturer le charmeur, puis nous le tuons de chagrin.
C’est peut-être ça l’amour : rester aux côtés de l’autre , mais sans le posséder.
Nous devons découvrir qu’il y a un charme dans notre quotidien qui ne peut être découvert que lorsque nous nous efforçons de ne pas le retenir.
Vivre, c’est perdre.
C’est une aventure de laisser le temps prendre ce qui lui appartient, et de ne laisser que ce qui nous est nécessaire pour continuer les nouvelles découvertes.
Il y a une beauté cachée dans les passages. Une ancienne vie qui se renouvelle. Des choses anciennes qui sont fraîches. Nous avons juste besoin de supprimer les obstacles sur le chemin. De laisser la vie se dérouler.
Aucune tristesse ne mérite d’être éternelle. Ni le bonheur. C’est peut-être pour cela que le verbe diviser nous aide tant lorsque nous avons besoin de comprendre le sentiment de tristesse et de joie .
Ils ne sont supportables que dans la mesure où nous les partageons.
Et pendant que nous partageons, ils passent, comme tout doit passer.
Ne vous accrochez pas à l’événement qui semble maintenant définitif. Le temps passe… Une rédemption se nourrit en ce moment…
Ouvrez vos yeux. Il y a des charmes cachés partout. Faites attention. Ils sont petits, mais constants.
Regardez par la fenêtre de votre vie et remarquez le chant de l’oiseau dans votre histoire.
Écoutez ce qu’il chante, mais ne tombez pas dans la tentation de le vouloir tout le temps rien que pour vous. Il n’est enchanté que parce que vous ne le possédez pas.
Et c’est la beauté de ce moment : le temps passe, mais le charme que vous pouvez recueillir sera suffisant pour attendre jusqu’à demain, lorsque l’oiseau enchanté, au moment où vous vous attendrez le moins, se posera à nouveau sur votre fenêtre.
Jean-Charles R. Pour ESM
