« Il n’y a pas de gouffre dont vous ne pouvez pas sortir à condition de faire le bon effort au bon moment.… faites la prochaine chose avec diligence et dévotion. »
Le 15 décembre 1933, Jung a répondu à une femme qui lui avait demandé des conseils sur la façon de vivre, tout simplement. Deux générations après que le jeune Nietzsche a averti que « personne ne peut construire le pont sur lequel vous, et vous seul, devez traverser le fleuve de la vie », Jung a écrit :
Chère Madame V.,
Vos questions sont sans réponse parce que vous voulez savoir comment il faut vivre. On vit comme on peut. Il n’y a pas de voie unique et définie pour l’individu qui lui soit prescrite ou qui soit la bonne. Si c’est ce que vous voulez, vous feriez mieux de rejoindre l’Église catholique, où ils vous disent ce qui est quoi.
De plus cette voie s’inscrit dans la voie moyenne de l’humanité en général. Mais si vous voulez suivre votre propre voie, c’est la voie que vous vous faites, qui n’est jamais prescrite, que vous ne connaissez pas d’avance, et qui se fait tout simplement d’elle-même lorsque vous mettez un pied devant l’autre.
Si vous faites toujours la prochaine chose qui doit être faite, vous avancerez de la façon la plus sûre sur le chemin prescrit par votre inconscient. Dans ce cas, il n’est naturellement d’aucune aide de spéculer sur la façon dont vous devriez vivre.
Et puis vous savez aussi que vous ne pouvez pas le savoir, mais faites tranquillement la chose suivante et la plus nécessaire. Tant que vous pensez ne pas encore savoir ce que c’est, vous aurez encore trop d’argent à dépenser en spéculations inutiles.
Mais si vous faites avec conviction la prochaine chose à faire et la plus nécessaire, vous ferez toujours quelque chose de significatif et prévu par le destin.
Cordialement,
CG Jung
Deux mois plus tard, dans un autre geste amical et de sagesse, Jung a approfondi la question dans une lettre à un homme en détresse, Jung sentant qu’il avait, tout simplement, mal vécu sa vie.
Jung a écrit :
Cher Monsieur N.,
Personne ne peut réparer une vie mal gérée avec quelques mots.
Mais il n’y a pas de gouffre dont vous ne pouvez pas sortir à condition de faire le bon effort au bon moment.
Quand on se retrouve en difficulté, tout comme vous, on n’a plus le droit de s’inquiéter de la stupidité absolue de certains, mais plutôt de s’efforcer à faire les choses avec diligence et dévotion, et ainsi gagner la bienveillance des autres.
Et petit à petit…. avec cet état d’esprit, vous finirez par vous retrouver. Malheureusement c’est par la douleur que l’on apprend, l’expérience, et lorsque les temps sont durs.
Sincèrement,
CG Jung