Cette semaine, j’ai vécu un traumatisme qui a chamboulé mon histoire personnelle, mais pourtant une nouvelle histoire ne s’est pas encore établie.
Charles Eisenstein appelle cela « l’espace vide entre les histoires ». Beaucoup d’entre nous sont en ce moment dans cet espace vide entre les histoires, lorsque vous vous sentez perdu, avec une crainte infondée, boulversé, un peu comme si vos racines étaient arrachées et que vous ne saviez pas très bien où prendre port. Tout ce que vous pensiez savoir – de vous-même et du monde – pourrait être maintenant remis en question.
Même nos systèmes – le système médical, le système politique, le système éducatif, le système bancaire – sont également dans l’espace vide entre les histoires. Nous savons que l’ancienne voie est en train de s’effondrer, et que la nouvelle voie n’est pas encore née.
Comme Charles l’écrit dans Le Monde Plus Beau Que Nos Coeurs Savent Possible:
Il convient de noter que, si vous êtes dans l’espace sacré entre les histoires, laissez-vous y être pleinement présent. Il est effrayant de perdre de vue les anciennes structures de sécurité, mais vous constaterez que, même si vous risquez de perdre des choses que vous ne pensiez pas pouvoir perdre, tout ira bien pour vous. Il y a une sorte de grâce qui nous protège dans cet espace vide entre les histoires. Rien ne dit que vous ne détruirez pas votre mariage, votre argent, votre travail ou votre santé. En fait, il est très probable que vous perdiez une de ces choses.
C’est que, vous découvrirez que même en perdant toutes ces choses, vous vous en sortirez toujours. Vous serez plus en contact avec quelque chose de bien plus précieux, quelque chose que même l’incendie le plus intense ne peut brûler et que nul ne peut voler, quelque chose que personne ne peut prendre et qui ne peut être perdu.
Plus tôt cette semaine, j’ai assisté au mémorial d’une personne chère décédée ces six derniers mois. Aux côtés d’autres personnes, j’ai assisté à ce que la fiancée du défunt traversait dans son espace entre les histoires.
Ils étaient censés se marier cette année, et au lieu de cela, l’un des deux s’est retrouvé à dire ‘au revoir’ à l’autre. Lorsque la fiancée du défunt s’est levée pour parler au mémorial, elle leva les yeux vers sa photo projetée sur l’écran et, avec les larmes aux yeux, elle dit: « Mais que fais-tu là? ».
La femme qui était censée être la demoiselle d’honneur présidait la cérémonie pendant que nous nous consolions tous les deux dans le deuil, dans les pleurs et les rires, tout en célébrant notre attachement et notre amour. Lorsque nous nous rendons compte que nous ne sommes pas seuls dans cet espace perdu, nous trouvons du réconfort dans la communion du cœur, qui n’a aucune frontière défendue
Qui suis je?
Le traumatisme que j’ai vécu cette semaine m’a propulsé dans le questionnement du « Qui suis-je? ». Et si en réalité je n’étais pas la personne que je pensais être? Si je ne suis pas ce que je pensais être, alors « Qui suis-je? ». Ensuite, cela m’a fait plonger dans un malaise, pataugeant dans l’incertitude, à la dérive de fossés qui engendraient davantage d’interrogations, tout en découvrant l’espace de répit entre les histoires.
Cet espace entre les histoires est un lieu propice, une place vide, un endroit rempli de potentiel mais qui soulève aussi davantage d’interrogations. Vous ne parvenez pas à passer directement à la phase « Ok maintenant je grandis » sans avoir du mal à reconnaître que vous marquez la fin de quelque chose. Comme Charles le suggère, nous lâchons prise de l’ancienne histoire avec grande réticence, tout en nous accrochant à tous les effilochages restants comme s’ils étaient des gilets de sauvetage. Pourtant, si nous ne tentons pas de nous accrocher, nous nous concentrons à nous jeter par-dessus bord tout en nous précipitant dans le vide, résistant à la tentation d’assumer prématurément une nouvelle histoire.
Nous sommes dépouillés, nous le sommes tous en ce moment. Tout ce qui a été caché est révélé. Toutes les choses pour lesquelles nous étions dans le déni sont en train de remonter à la surface. Tout ce qui n’est pas ‘amour’ se détache. Cela peut sembler douloureux, comme le fait de mourir, car en quelque sorte, nous sommes en train de mourir. Ce qui ne représente pas votre essence la plus pure perd du terrain à vue d’oeil. Votre âme traverse le sol comme une balle qui se heurte contre de la terre gelée, avec acharnement contre la résistance. Vous ne devez pas trop pousser. Votre véritable nature trouvera son chemin vers la surface et s’épanouira sans tout cela.
Se mettre à nu
Il y a beaucoup de choses sur lesquelles il faut lever les voiles: les nombreuses couches de conditionnement culturel, la réflexion limitée que vous avez appris dans l’enfance, la programmation enseignée par vos parents, la façon dont les médias vous lavent le cerveau, ce que les « règles » vous disent sur la façon d’être un humain. Peut-être que nous sommes même en train de briser des liens karmiques antiques nous permettant d’être libres à nouveau. Il est difficile d’être à la fois humain et divin, et de maintenir ce paradoxe avec une perception radicale.
Cela fait mal, et on doit le peler. On dirait que vous êtes dépouillé de votre peau.
Comme l’a dit Brené Brown, « J’ai l’impression d’être comme une tortue sans carapace ». Dieu, donne moi une carapace. Et pourtant nous nous libérons consciemment de cela, de cette carapace que nous portons depuis l’enfance. Nous pouvons la combattre si nous voulons. Mais la traction de l’âme est comme la marée de l’océan; elle nous tire comme le magnétisme de la Lune qui fait écraser les vagues sur la rive. Nous pouvons la combattre si nous le souhaitons, ou nous pouvons nous laisser emporter.
Si vous êtes submergé, reposez-vous dans le sanctuaire de votre cœur, où vous prendrez conscience que se mettre à nu n’est pas une punition; c’est une réponse à une prière silencieuse pour la liberté dont vous ne vous souvenez peut-être même pas.
Vous ne pouvez pas précipiter la mise en place
Lorsque vous êtes dans l’espace vide entre les histoires, Charles écrit: « Le défi dans notre culture est de vous permettre d’être dans cet espace, de croire que la prochaine histoire se présentera lorsque le temps entre les deux sera écroulé et que vous en aurez conscience ». Ou peut-être qu’il n’y a pas de prochaine histoire. Peut-être est-ce ainsi que nous commençons à habiter le moment présent. Pas d’histoires. Juste maintenant. Et maintenant. Et maintenant.
Je ne suis sûre de rien ces temps-ci, mais il me semble que lorsque vous êtes dans cet espace vide entre les histoires, la seule chose à faire est de vous reposer. Permettez-vous d’être réconforté. Dormez beaucoup. Soyez présent dans la nature. Méditez. Faites-vous une mise en beauté. Créez des choses sans raison. Faites ce que vous pouvez afin de détendre l’esprit du singe qui saisit la prochaine histoire. Entourez-vous des amoureux de la vie en qui vous avez confiance et qui cultivent la tranquillité en vous. Soyez exquis pour vous-même.
L’espace vide entre les histoires consiste plus à« être » et moins à « faire ». Il y aura un temps pour faire, mais chaque chose en son temps. Rappelez-vous que, quelque chose de nouveau est né à l’intérieur de vous. Vous ne pouvez pas précipiter la mise en place.
Source Les espaces vides entre les histoires : lissarankin.com